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Darrois Villey Maillot Brochier obtient gain de cause devant le Conseil constitutionnel pour la reconnaissance du non bis in idem
Une même personne ne pourra plus, en matière boursière – infractions d’initiés –, être poursuivie et sanctionnée deux fois pour les mêmes faits par l’Autorité des marchés financiers et par le Juge pénal. Le 18 mars 2015, en déclarant contraire à notre Constitution ce système critiqué depuis de nombreuses années, le Conseil constitutionnel a rendu une décision s’inscrivant dans le droit fil de la jurisprudence des Cours suprêmes européennes qui ont déjà condamné ce système à de multiples reprises.
Cette décision historique doit être saluée, en particulier dans un pays où l’efficacité du système judiciaire est régulièrement remise en cause. Il a fallu aux membres du Conseil Constitutionnel beaucoup de courage pour que ce dispositif légal, en vigueur en France depuis une trentaine d’années, soit condamné. Avant d’être soumises au Conseil constitutionnel, les questions prioritaires de constitutionnalité à l’origine de ce revirement ont ainsi passé, avec succès, les filtres du Tribunal correctionnel et de la Cour de cassation, qui avaient pourtant toujours validé le système du cumul en matière boursière.
Les effets de cette décision sont immédiats pour les personnes définitivement condamnées par une décision de l’AMF ou du Juge pénal, qui ne peuvent désormais plus être poursuivies une seconde fois pour les mêmes faits.
Le Conseil constitutionnel a, en outre, donné au législateur un délai expirant le 1er septembre 2016 pour modifier ce dispositif, date à laquelle les textes instituant le manquement et le délit d’initié seront définitivement abrogés. Il appartient, en conséquence, au législateur de réformer dans l’intervalle le dispositif de répression des délits et manquements boursiers de manière à ce que des faits identiques ne puissent plus faire l’objet que d’une seule poursuite, soit devant l’AMF, soit devant le Tribunal correctionnel.
Il pourrait, par exemple, instituer une commission mixte, composée de membres de l’AMF et du parquet, qui déciderait si c’est la voie pénale ou la voie administrative qui doit être préférée, ou encore, si une transaction est envisageable.
Il faudra déterminer si cette décision doit être prise au terme ou dès l’ouverture de l’enquête et également préciser à qui elle sera confiée.
Si la voie pénale est choisie, il conviendra de déterminer le rôle de l’AMF devant le juge pénal : sera-t-elle une autorité de poursuite aux côtés du parquet, dotée du pouvoir de requérir une sanction pécuniaire ou pourra-t-elle seulement présenter des observations?
Autant de questions que le législateur devra trancher dans les mois qui viennent.
Dans cette attente, les défenseurs des droits et libertés fondamentaux ne peuvent que se réjouir de la décision rendue par le Conseil Constitutionnel qui replace la France dans sa capacité à garantir les droits de la défense et plus généralement les droits de l’homme.